mer. Juil 16th, 2025

Évacuations sanitaires : symptôme d’un système à bout de souffle ?

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Par Xavier Nama, journaliste et expert en communication et coopération décentralisée, pour Santé Nature Infos.

Alors que les évacuations sanitaires se multiplient en Afrique subsaharienne, une question majeure persiste : pourquoi les élites africaines continuent-elles de préférer les hôpitaux occidentaux aux infrastructures locales pour leurs soins médicaux ? Est-ce un problème de confiance, de qualité ou simplement une habitude héritée d’un certain rapport à l’ancienne puissance coloniale ?

À première vue, la carte sanitaire du continent semble en effet fragile. Dans de nombreux pays, les hôpitaux sont sous-équipés, mal entretenus et les conditions d’accueil des patients laissent à désirer. Pourtant, paradoxe frappant, bon nombre de médecins africains sont formés dans les meilleures universités et hôpitaux d’Europe, d’Amérique du Nord ou d’Asie. Le problème ne réside donc pas toujours dans la compétence, mais dans les moyens, la gouvernance et la valorisation du personnel de santé.

À cela s’ajoute une dimension psychologique non négligeable. Le réflexe de « l’exil médical » s’est peu à peu institutionnalisé, parfois même banalisé. Il traduit souvent une perte de confiance des dirigeants eux-mêmes dans les systèmes qu’ils sont censés construire et défendre.

Faut-il alors réinterroger le rôle de la coopération internationale, et plus spécifiquement celui de la coopération Sud-Sud ? Dans un monde en mutation, où les solidarités entre pays en développement gagnent en pertinence, il devient crucial de partager savoir-faire, innovations en santé communautaire, mais aussi bonnes pratiques de gestion hospitalière.

Le rôle des institutions internationales, telles que l’OMS ou la Banque mondiale, reste fondamental. Mais ces aides seront inefficaces sans un véritable engagement local : une volonté politique forte, une réforme des politiques de santé publique, et surtout un management moderne, transparent et inclusif.

Prenons l’exemple du Cameroun. Ce pays dispose d’un Hôpital Général dans chaque grande région. L’Hôpital Général de Yaoundé, en particulier, est aujourd’hui à un tournant. Avec l’arrivée d’une nouvelle équipe de direction, audacieuse et ouverte à l’innovation, un souffle nouveau semble animer cette institution. Le management participatif, le renforcement du dialogue entre soignants et patients, l’optimisation des services spécialisés et l’investissement dans les ressources humaines sont des signaux encourageants.

Ces changements, s’ils sont consolidés et généralisés, pourraient permettre au Cameroun – et à d’autres pays africains – de devenir non seulement des références régionales en matière de soins, mais aussi de véritables pôles de santé d’excellence en Afrique.

Les évacuations sanitaires ne devraient être qu’une exception. Redonner confiance dans les systèmes locaux de santé, c’est restaurer la dignité des peuples et affirme la souveraineté sanitaire du continent.

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